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Pour l'amour du slam

L'atmosphère se réchauffe de plus en plus. Je le sens. Et j'ai seulement quelques secondes pour décider si tout doit s'arrêter. Ou si l'on continue innocemment sur cette voie qui risque de me coûter cher. Il faut avoir passé maintes fois cette étape pour être sûr de ne pas faillir au moment voulu, au moment où il faut laissez aller ses lèvres en espérant faire les bons mouvements avec. Je crois que ça va être mon tour. J'essuie furtivement la sueur qui suinte maintenant sur mes paumes. Et mon front. Je ne veux pas qu'elle voie ma fébrilité. Je sais qu'à l'instant où elle va se retourner, ce sera à moi d'agir,

à moi de prendre les choses en main. Si je veux parvenir à ce que je souhaite, faillir n'est pas envisageable. Je sais d'avance quel mot elle va prononcer, sur quel ton même. Enjoué et interrogateur, comme à son habitude. Et je sais d'avance quels mots je veux prononcer, sur quel ton même : sérieux et affirmé, et c'est la première fois que je l'oserais. Je passe une dernière fois ma langue sur mes lèvres. Les laisser aussi sèches seraient une erreur de débutant et je ne veux pas être de ceux-là. Je vais le faire. Je prends mon courage à deux mains. Et de ma voix la plus claire "non ce sera tout merci". Et la boulangère passa à un autre client.

Coralie Bailly

Salut les Covid'

Alors ?

Vous l'avez ou vous l'avez pas ?

Vous lavez ou vous lavez pas, vos mains, tous les matins ?

Vous l'avez eu et du coup vous vous l'avez plus ?

Vous l'avez refilé à qui ? Vous l'avez donné ou vous l'avez vendu ?

Ah ? On vous l'avait prêté et vous l'avez rendu ?

Vous vous en êtes débarrassé ?

Vous l'avez perdu ?

Vous savez où vous l'aviez attrapé ?

Un proche ou un inconnu ?

Et vous l'a mis dans la poche ou refilé dans la rue ?

Peut-être avez-vous covoituré ?

 

Les passagers râlent de vos virages virils

Mais oublient un peu vite les attaques virales,

En pleine ville, des armées de débiles vous vomissent à la gueule

Leur bille a deux balles sur les quais, ils s'égarent,

Vous balancent leurs salves de salive souillée

Des seaux de sueur fétide, infectée

Leurs bataillons de postillons pullulent

Et étendent la contagion à toute la région.

Salut les Covid'

Regardez vos vies, devenues, coquilles vides

Vos envies évadées, ravalées au rang de velléités, futiles

Vos désirs avides et voraces invalidés par la réalité,

Oblitérés, oubliés…

Regardez, de Mulhouse à Marseille, la diagonale du Covid'

Déferler en images terribles, au 20 heures

Ca dévale, ça défile et nos villes désormais résonnent d'un écho vide.

 

Salut les Covid'

Alors vous les avalez ou pas ? Les couleuvres visqueuses ?

Les nouvelles vérolées vomies par nos gouvernants avariés,

Sans gouvernail et sans phare, débordés, dépassés…

Les voyez-vous venir, ces voyous ?

Et vous dire : "Lavez-vous les mains et votez pour nous !"

Le voulez-vous la vérité sans fard et sans masque ?

Celle de notre vanité infinie

Incapable de voir notre vulnérabilité d'humains qui n'ont rien compris.

 

Salut les Covid'

A demain,

Peut-être…

Denis Jacquier

Longtemps confiné

Une fois par semaine me rasais

Laissant mes poils poussés

Dans un sachet conservés

Pour un oreiller douillet

Te confectionner

Le sachet as trouvé

Sans pitié l'as jeté

M'as houspillé

Adieu rêve léger

Sur oreiller barbier

Paul Claustre

Ce jour-là,

Confinement jour zéro

Restez chez soi, être un héros

C’est la guerre, il l’a dit Jupiter

Pas contre l’Allemagne ou l’Angleterre

Nos amis héréditaires, dans la même galère

Mais contre l’air.

Le même air qu’on partageait naguère

Avec nos mères et nos grands pères

Le jour d’avant, on n’y croyait guère

Mais c’est la guerre

Les jours d’avant, tout était normal

Normalement bancals, rien de mal

Boire un dernier verre en terrasse

Avant qu’le sort nous terrasse

On n’avait pas compris,

Nous les Français insoumis

Que la mort parfois nous sourit

Pour encenser nos conneries

C’est trop casse-gueule.

On a entendu BFM TV

On a fermé nos grandes gueules,

On s’est précipité grégaires,

A Carrefour ou chez Leclerc

Dévalisé les rayons alimentaires

Torché le PQ, rempli le frigidaire

Les précautions d' panique élémentaire

Pas de pénurie !!! Mon cul imaginaire

Enfin prêts à la faire, la guerre

Mais avant, partir à la campagne

Choper le dernier train, avant ça gagne

L’exode rural version virale

Des citadins, parisiens trop vite confinés

Trop pressés, trop condamnés

Confinement, on nous ment, on s'éloigne

Courage, fuyons à la foire d’empoigne

Bonimenteur de nos peurs, de nos erreurs

Le vertueux c’est nous, pas l’autre

L’humain cité ne fait pas preuve d’humanité

La grippe maligne va-t-elle nous épargner ?

Bas les masques,

Y ‘en a plus

Nos gouvernants préfèrent nous expliquer qu’ils ne sont pas

Toujours utiles

Mensonges nécessaires et inutiles

Vérités d’un jour, pas toujours

Pénurie de masques, pénurie de tests,

Pénurie de gel hydroalcoolique

Litanie radiophonique

Ça m’fout la colique,

Pourtant Buzyn, en Janvier 2020, avant sa "fuite à Varennes"

Assurait en parfaite déclaration apostolique

Que les stocks étaient suffisants, sinon pléthoriques

Vive la fête foraine, vive la reine

La France est un pays riche

Riche de ces certitudes jusqu'à l'incurie

Riche de ces pénuries

Sacrifié le service public, l'Hôpital public

Pour des raisons libérales idéologiques, dogmatiques

Puissent les conséquences ne pas être catastrophiques ?

Ne pas avoir à choisir qui vivra,

Un drame

Am, stram, gram

Pic et pic et colégram

Éliminatoire…

 

Nos vrais héros, les vrais guerriers

Point de Superman, de Captain America, ou de Spiderman

Ces faux héros névrosés américano-survitaminés

Tous biens planqués dans les BD

Nos vrais héros, les premiers de cordées

Ceux qui sont là pour nous soigner

Ils sont faciles à nommer

Docteurs, infirmiers, aides-soignantes, brancardiers

Tous les personnels soignants et hospitaliers

Martyrisés ces dernières années par la rentabilité

Insuffisamment protégés

Répétant sans cesse les mêmes gestes pour sauver,

Urgente nécessité

Beaucoup sont forcément contaminés, infectés,

Certains sont… déjà décédés

Leurs supers pouvoirs ordinaires

Ne les protègent pas de ce virus planétaire

Et pourtant ils luttent aujourd'hui… comme hier

Et nous on admire, et on espère

Loin de Koh Lanta et de ses rivalités

Loin des foulards rouges, des foulards jaunes, futilités

Ils sont nos vrais héros, nos premiers de cordées

Postés sur leurs poteaux depuis des semaines

Ils se démènent, ils tiennent

Leurs panoplies de super héros enfilées

Des blouses blanches, des blouses bleues associées

Avec pour seul totem d’immunité,

Le courage et l'abnégation, mobilisés dans l'action

Palliant les trop faibles capacités sanitaires

En première ligne, en toute humilité, exemplaires

Fatigués, bravant le danger, ils vont nous sauver

Alors pour les soutenir du fond du cœur,

Confinés solidaires

À 20 heures, applaudissons-les.

Alain Fourcade

Oui la vie

Tu es là

Oiseau, arbre, herbe, fleur

Et nous

Pourquoi ?

Nous, mais pas tous

Plus tous

Nous qui avons dérangé un ordre millénaire

Nous qui voyageons

Plus vite

Moins cher

Qui collons notre gueule devant des merveilles

Qui l'envoyons à des milliers d'amis

Qui voyons leurs assiettes sur nos petits écrans

Tous goinfres de ce monde

De ces vies qui ne nous appartiennent pas

Nous gros et riches

Nous angoissés

Par un virus que nous avons libéré

Et eux derrière les barbelés de nos frontières

Eux qui mourront aussi

Plus que nous

Qui mourront d'avoir voulu vivre comme nous

Qui mourront sans savoir que nous les avons tués

Oui la vie

Tu es tout cela

Nous t'aimons

Alors après

Si on recommençait

Autrement

Avec eux

Et les oiseaux, les arbres, l'herbe, les fleurs…

Tous ensemble… Tous ensemble… Tous ensemble…

Ce ne serait qu'un début… On commencerait le combat

Chiche.

Paul Claustre

Pas envie d'écrire

Pas envie d'écrire sur toi Corona, on entend parler que de toi

mais regarde-toi avec ta couronne de piques là

Ta face d'ARN arachnéenne

Tes protéines chafouines

T'es même pas foutu d'avoir de l'ADN

T'es ridicule avec ta dizaine de gènes

 

mais ce bourdon

Ce gros Bourdon qui sort d'hibernation

Attention où tu mets tes pieds, tu as failli l'écraser

Cette boule de poils qui a du mal à voler

C'est la reine qui cherche son nid, fais gaffe, abruti !

Ce bourdon donc, qu'est-ce qu'il est mignon

Je voudrais pouvoir le dessiner

Pas besoin de le sublimer, il est parfait

Pouvoir lui dresser une couronne de lauriers, pas de piques acérés

Mieux encore, lui écrire une ode ça serait mérité

 

Mais ce lilas

Oui, celui qui est juste à côté de la maison

Que je hume parfois mais ne regarde pas

Ses petites feuilles qui s'étirent et grandissent

Alors que se forme sa thyrse

Ces tiges qui se garnissent, son port qui se ferait presque altier

Sans doute pour se venger de son statut d'arbuste moqué

Ce lilas que Manet et Van Gogh ont croqué alors que je l'ignorais

J'aimerais lui composer une chanson où il serait le roi

La rose, les jonquilles et le poinçonneur, on leur fait un bras d'honneur

Lilas, vive toi !

 

Mais ce ciel d'Azur ou d'encre

Ce ciel peuplé d'étranges animaux vaporeux

cumulozébus, altodiplodocus, stratolycus

Ce ciel à la limpidité et au bleu parfois revenus

Débarrassé de milliards de poussières incongrues

Ce ciel où l'on peut à nouveau épingler nos rêves étoilés

Dans sa sombre beauté

J'adorerais lui dédier un sonnet

Mais ces voisins

Qui n'existaient que via un bonjour poli de Truman Burbank

Que par un signe de tête échangé derrière des vitres de tank

Mais ces amis

Ces amis au fil des ans dispersés aux 4 vents

Hologrammes d'un passé qui ne fait que s'éloigner

Ces voisins et ces amis qui se remettent à exister

Je désirerais leur offrir un bouquet de proses

 

Ah, te revoilà Corona,

Je voudrais te dire : barre-toi de là, casse-toi, ça suffit comme ça

Mais même si peut être tu m'emporteras

Même si des dégâts, tu en as fait beaucoup, déjà

Même si des malheurs et des pleurs tu en as causé et en causeras

je ne peux pas t'en vouloir d'être là

 

Je ne peux pas t'en vouloir d'être là

Tu n'es qu'un minuscule microbe, pas une star de cinéma

Bizarrement, avec toi, l'espoir d'un après est à nouveau là

Plus rien ne sera comme avant, l'Humanité, juré craché,

Va se remettre à penser

La terre sera préservée, les animaux seront respectés

Le temps attend, il prend son temps, tout est en suspens

 

Nicolas

Pendant qu'on se pavanait

La pandémie, au nez nous pendait.

Pangolin est rancunier

Avant d'être décimé

Pangolin s'est vengé.

Son virus avide sur nous se rue.

Le COVID à la vie dure et vide nos avenues.

Le STRAS nous stresse et on tousse tous

L'apoplexie nous guette et le sang nous glace

L'hydro alcoolisme nous menace

Postillons mortels si tu me parles en face.

Sauvons les caissières grâce au plexiglass !

Bienvenue au bal masqué de l'inconséquence.

Insuffisances et suffisance

Couleuvres avalées

Vote à mains lavées

Raison d'état -état d'urgence- urgences

Saturées – Hôpital en piteux état

Sommités dépitées – ainés décimés

Prix à payer.

Soignants sacrifiés

Migrants oubliés

Dividendes versés

Le monde entier s'enlise dans la crise

Certains donnent leur chemise

Amazon rafle la mise.

Vidéos virales

Pour tribus éparpillées

Ecrans en guise de feux de camp.

Faut-il sauver ce qui peut encore l'être

Ou s'en remettre au néant ?

Futur sans contact

Baisers prohibés

Gestes barrières

Frontières barbelées

Rideaux de fer fermés.

Humanité confinée

Voyages annulés

Sorties contrôlées

Attestations signées

Citoyens géo localisés

Adieu liberté.

 

Bernard Jacquier

Ô Coronavirus, tu fais des ravages

Tu n'épargnes aucun personnage

 

Ô Coronavirus, tu es insidieux

Tu crées des teigneux

Ô Coronavirus tu noues des liens dématérialisés

Tu oublies les défavorisés

 

Ô Coronavirus les nantis de la culture sortirons plus riches

Les petits des quartiers défavorisés plus chétifs

 

Ô Coronavirus tu applaudis des professions

Tu les isoles à cause de la contagion

 

Ô Coronavirus tu permets à l'état de découvrir les soignants

Qui crient à l'aide depuis longtemps

 

Ô Coronavirus je savoure la chance d'être dans une maison

Avec jardin et moyen de communication

 

Ô Coronavirus tu t'attaques à tous les terriens

Mais face à nous tu ne vaux rien

 

Ô Coronavirus tu te crois le plus fort

C'est sans compter sur les renforts

 

Ô Coronavirus même pas peur

Grâce au confinement, nous serons les vainqueurs

Ça ne se voyait pas

Mais ils bouillaient intérieurement

D'une joie lumineuse

Tous les invités tournaient vers le photographe

Leurs sourires hypocrites

Chacun la tête dans les étoiles

Leurs souvenirs surgissant de nulle part

 

Te souviens-tu de nos retrouvailles un soir d'été,

De nos engueulades sous la pluie torrentielle

De ces moments heureux au clair de lune

De nos nuits torrides sous les tropiques

De nos dîners sous la tonnelle

Te souviens-tu de nos longs baisers langoureux

 

Réveille-toi, je suis là

Et non je sais tes souvenirs sont partis

Et ton sourire aussi.

Claire Alglave

Il aura suffi d'un rien

D'un vaurien microscopique

Pour que le monde panique

Pour que la vie nous quitte

Pour que les rues se vident

Covid, face à notre destin ?

 

Il aura suffi d'une crise sanitaire

Pour qu'on se terre

Assignés à résidence privés de liberté

Munis de laissers-passers,

Obligés de télétravailler

Le bagne dans une prison dorée.

 

Il aura suffi d'une maladie

Pour qu'on s'interroge sur la vie

Qu'on comprenne ce qui l'assouvit

Et qu'on prenne un vie-rage

Pour combattre l'ennemi

Covid est-ce bien lui ?

Il aura suffi d'un virus

Pour que la vie ruse

Qu'elle stoppe cette course effrénée

Pour nous montrer les vies-sages

Qu'on ne voyait plus

 

Il aura suffi d'une guerre

Pour savoir que l'ennemi est dans l'air

L'air du temps

Celui de cette société

Qui a trop longtemps ignoré ses minorités

Et préféré la rentabilité

Celle qui n'a pas de munitions pour ses soignants

Juste de l'argent pour les géants

Celle qui laisse les petits s'épuiser au combat

Résistance es-tu là ?

L'appel suivra

Masques, ingéniosité, technicité, nouveautés, solidarité

Toutes ces idées pour un nouveau combat

Demain pourrait être ce monde là

 

Claude Chalvin

Je m'arme, je suis armée,

Je pars en guerre, suis-je assez armée

Contre qui ? contre quoi ?

Je vais faire des emplettes,

Emplettes ? Question de survie

Question de vie, oui.

Je vais acheter du pain, des fruits et légumes,

Cinq par jour qu'ils disent partout !!

Suis-je assez armée

Contre l'ennemi, le corona,

Couronné lui, de quel roi, de quel droit ?

Gel, masque, gants

Contre mes amis, mes voisins,

Gel, masque, gants

Mes amis, mes voisins de loin

Un petit salut de la main, de loin,

Un sourire interrogateur, l'ont-ils attrapé ce putain de virus ?

Surtout ne pas les approcher…

Suis-je assez armée ?

Gel, masque, gants

L'humain est porteur,

Humains restez loin !

L'humain est devenu prédateur

Suis-je assez armée ?

Gel, masque, gants

Suis-je porteur moi aussi ?

Pas de soupe de chauve-souris

Pas de nems de pangolin,

Non, le virus est loin, pas chez moi,

Pas sur moi, pas dans moi !

Au marché elle me met les légumes dans un sac

Avec 200 g de virus en plus…

Au secours, elle me contamine…

Je délire, ça y est, je suis touchée, je suis atteinte, je l'ai attrapé…

Pourtant j'étais armée

Gel, masque, gants

Je délire, je respire encore…

25 mars 19 h 30, cloche, bougies, espoir, fraternité…

De loin, putain…

Annie Riegel

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